Origines

Julie Boscus © GP

Une anomalie signée Michelin : l’absence d’étoile chez Julien Boscus. Ce grand (par la taille et le talent) chef surdoué, qui fut jadis étoilé, une décennie durant, aux Climats dans le 7e, après ses classes aux côtés de Yannick Alléno (3 ans au Meurice) et de Pierre Gagnaire (7 ans au Balzac et à Séoul), a pourtant tout pour lui: un service au taquet, des vins de choix bien conseillés, un cadre moderne, confortable et rassurant, plus des produits bien sourcés et dont les « origines » – c’est sa devise ! – sont précisées avec soin sur une carte tentatrice.

Amuse bouche © GP

On ajoute que les menus sont bien pondus, que ceux du midi constituent des affaires et que l’actif Julien qui renouvelle sa carte avec régularité joue les saisons et leurs meilleurs fruits avec un talent sans faille. Des idées de ce que vous trouverez chez lui : le croq’ haddock de Boulogne sur Mer, la vieille mimolette et son beurre à l’ail des ours, l’origami de betterave, brocciu avec pignons de pins et marjolaine ou encore l’exquise tartelette à la cervelle de canut et radis roses qui réveillent le palais en liminaire et constituent de fringants et exquis amuse-bouche.

Langoustines en ravioles © GP

Ensuite ? Les langoustines des côtes bretonnes en deux services : croustillante au riz soufflé, tartare d’algues et condiment mangue & basilic thaï en raviole relevée de main de Bouddha, bisque de têtes au Noilly Prat, les morilles fraîches, en fine tartelette garnie d’une légère mousseline de pomme de terre à l’ail des ours, avec des morilles crémées au vin de voile du Mas Delmas et un jambon gascon de Pierre Matayron, sans omettre ce morceau de bravoure marin que constitue la barbue des côtes basques, cuite à four doux, avec artichaut poivrade étuvé aux anchois fumés de Cantabrie, des pommes de terre nouvelles de Noirmoutier et velours de feuilles de capucine avec son beurre blanc relevé d’un miso de lupin artisanal.

Tartelette de morilles © GP

On ajoute le splendide ris de veau de la Maison Vadorin, référence du genre et que fit connaître jadis Yannick Alléno au temps de son terroir parisien, à la fois doré au sautoir, croustillant et fondant, flanqué d’asperges vertes du Vaucluse étuvées au cédrat et de coques d’Utah Beach gratinées aux herbes fraîches avec un jus de veau relevé d’angostura. Mais il y a encore cette belle truite (d’élevage des Pyrénées), cuite à four doux, asperges blanches du Vaucluse grillées et tomates datterino, sa crème crue aux œufs de truite, champagne, oseille fraiche, citron jaune et huile d’herbe.

Barbue et artichaut © GP

Il y a toujours beaucoup d’ingrédients dans l’assiette – on est élève de Pierre Gagnaire ou on ne l’est pas et cela laisse des traces …  Mais la netteté et la précision sont au rendez vous, comme au registre des douceurs. Ainsi le parfait glacé à l’huile d’olives maturées des Baux de Provence, un méli-mélo d’agrumes de saison, des olives noires de Kalamata confites, un sablé breton et sorbet aux herbes fraîches qui passe comme une lettre à la poste. Mais les fraises gariguette de Lizac, avec pain de Gênes, chantilly à la vanille de Madagascar, sorbet au céleri branche et tuile de sucre à la cardamome verte ne sont pas mal.

Ris de veau croustifondant © GP

Là dessus, un sommelier malicieux, Adrien Butko, qui a notamment oeuvré avec Philippe Mille aux Crayères et chez Pierre Sang durant sept ans, vous propose de bien jolis flacons au verre comme le blanc de Cotignac (Var) en Côtes-de-Provence du Clos de l’Ours cuvée « Milia » 2022, d’une belle fraîcheur acidulée, le grand Savennières au goût de terre du domaine Loic Mahé « Les Fougeraies », 2016 et le plaisant et très merlot Francs Côtes de Bordeaux du Château Marsau« Prairie » et 2019. Si tout cela ne vaut pas une étoile, on veut bien être changé en toupie… ou en inspecteur Michelin…

Parfait glacé aux agrumes © GP